06/12/21

Les forêts françaises se mettent au vert

  • Auteurs: Violette Ricard et Romain Lods
  • Temps de lecture: 4min

Les enjeux

Les petites forêts privées de 1 à 25 hectares représentent un tiers de la surface de la forêt française. Elles sont en grande majorité délaissées par leurs propriétaires. En effet, leur morcellement rend très difficile leur exploitation. Avec un faible taux d’exploitation de 25% du croît biologique, les objectifs du Programme National Forêts Bois (PNFB) seront difficilement atteints (augmenter les prélèvements de bois en France tout en assurant le renouvellement de la forêt, intégrer pleinement les attentes des citoyens vis à vis de la forêt, prendre en compte du changement climatique, créer des débouchés aux produits issus des forêts françaises et d’adapter la gestion des forêts aux besoins du marché). Pourtant, à elles seules, elles pourraient assurer théoriquement 60% des 12 millions supplémentaires prévus par le PNFB pour 2025. Les enjeux autour du carbone et du changement climatique, tout aussi cruciaux que l’enjeu économique, rendent nécessaire une intervention publique. L’aménagement et la gestion des espaces forestiers, principaux puits de CO2 de la biosphère terrestre, représentent assurément un enjeu prioritaire d’intérêt général : 1 m3 de bois récolté représente 0,2 à 0,5 tonne de CO2 stockée ou substituée et 1500€ de valeur ajoutée moyenne pour l’économie nationale. [1]

http://fransylva-paca.fr/wp/les-organismes-de-la-foret-privee/

Des solutions de gestion durable

Une gestion à la fois durable et dynamique de la forêt française relève de l’intérêt général pour plusieurs enjeux: économique (réduction des déficits en énergie des bois d’œuvre et des bois d’industrie), social (emplois dans tous les maillons des filières), écologique (climat et biodiversité).

Le CGAAER (Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux) a été chargé de concevoir des propositions susceptibles de concilier une gestion forestière dynamique tout en préservant les multiples fonctions de la forêt, notamment la protection de la biodiversité et l’adaptation au changement climatique pour lesquelles la diversité des modes de gestion est un atout indéniable.

Reposant sur un accompagnement humain, technique et financier, proposé sur la base du volontariat aux propriétés de 1 à 10 ha, ce dispositif d’incitation et de soutien propose trois types de mesures :

  • Faciliter l’action des acteurs publics et des professionnels privés dans leurs contacts avec les petits propriétaires ;
  • Mettre fin à la réticence des petits propriétaires privés à s’engager dans une gestion dynamique et consolider cet engagement sur du long terme ;
  • Orienter les petits propriétaires vers des actions positives de regroupement foncier et faciliter l’intervention des communes.

La mise en œuvre de l’ensemble de ces mesures permettrait dans une dizaine d’années un accroissement de récolte annuelle commercialisée de 5 millions de m3 pour les forêts privées inférieures à 25 ha. Cela correspondrait à 40 % de l’objectif de 12 millions de m3 retenu par le PNFB. L’État a rendu obligatoire, pour les forestiers, la mise en place d’un  Plan Simple de Gestion forestière pour les parcelles forestières d’une surface supérieure à 25 hectares. Ce plan a pour objectifs de mieux connaître son bois ou sa forêt, de définir des objectifs et faciliter les choix et décisions à prendre, de prévoir un programme précis de coupes et travaux, d’établir un bilan périodique de la gestion forestière et d’intéresser des héritiers au patrimoine forestier. [2]

Le label Bas-Carbone en forêt pour une gestion durable

Le label Bas-Carbone concerne divers secteurs industriels. Il a pour but de contribuer à l’atteinte des objectifs du PSG. Il permet de favoriser l’émergence de projets engagés pour la réduction de l’empreinte carbone de la France.

Le ministère de la transition écologique a validé les trois méthodes envisagées par le CNPF pour les propriétés forestières: ces méthodes concernent le boisement des terres agricoles ou des friches embroussaillées, la reconstruction de forêts dégradées et la conversion de taillis en futaie sur souche. 

Il existe aujourd’hui des entreprises comme la Société Forestière de la Caisse des Dépôts qui propose des services mettant en lien les organisations intéressées par le financement de puits de carbone dans les forêts autour de leurs activités et les propriétaires forestiers porteurs de projets Label bas-carbone. Il propose de réaliser de nombreuses missions telles que l’accompagnement des coopératives vers une transition écologique, l’amélioration de la gestion ou le reboisement de forêts dégradées. [3]

https://draaf.grand-est.agriculture.gouv.fr/Label-bas-carbone-et-foret

Une formation centrée sur la foresterie à Agroparistech

La forêt est un secteur prometteur dans lequel les étudiants d’AgroParisTech sont un atout non négligeable pour notre Junior-Entreprise puisqu’ils ont la capacité de réaliser des projets en lien avec la forêt. En effet, nous réalisons des études dans ce domaine et nous aimerions travailler davantage avec les acteurs du secteur forestier. N’hésitez pas à nous contacter si vous avez des questions, et nous serons ravis d’échanger avec vous sur votre projet !

17/06/21

Les marchés du carbone

Comprendre les crédits carbone et leur rôle dans les développements économiques et écologiques des pays

  • Auteurs : Matthieu Cieutat et Julie Perrin
  • Temps de lecture estimé : 5 min

Ce que l’on appelle crédit carbone (ou quotas de CO2) équivaut à l’émission d’une tonne de gaz à effet de serre (GES) en équivalent CO2. [1] Cette unité est née suite au protocole de Kyoto (1997) signé à ce jour par 195 états et l’Union Européenne. L’objectif central de ce protocole est la réduction puis la stabilisation des émissions de gaz à effet de serre par les pays signataires. Les crédits carbone sont alors convertis en une monnaie, les “CO2 coins”, ce qui crée ainsi un marché du carbone. Tarifer le carbone est un moyen de transformer l’aspect immatériel du gaz en quelque chose de quantifiable et échangeable entre 2 entités. Des marchés du carbone ont ainsi émergé à travers le monde. Aujourd’hui, le prix du crédit carbone oscille entre 1 euro (prix au Mexique) et 100 euros (prix en Suède) selon le type de projet mené et le mode d’émission/séquestration.[2]

Mais comment fonctionne le marché du carbone?

Un état ou une entreprise peut demander l’attribution de crédits carbone si il/elle peut respecter 4 conditions. Prenons un exemple simple et parlant: celui d’une entreprise qui plante des forêts [3]. Les conditions à respecter sont les suivantes:

  • Le porteur de projet doit montrer que sans l’attribution de crédits carbone (et à la revente de ceux-ci), le projet alternatif libérerait du CO2. Dans notre exemple, le projet de faire pousser une forêt capte du CO2, la raser en libèrerait, il faut donc continuer à entretenir cette forêt.
  • Il doit être possible de mesurer la quantité de CO2 séquestrée par rapport au projet alternatif, c’est-à-dire combien de tonnes de CO2 notre forêt emmagasine et combien elle en relâcherait si on la rasait.
  • Il doit être possible de vérifier que la quantité de CO2 stockée correspond bien aux crédits carbones versés pour le projet (pour fixer le prix du carbone).
  • La séquestration du carbone doit se faire sur la durée (minimum 7 ans).

Une fois que les crédits carbones sont alloués, l’État ou l’entreprise peut les revendre pour financer son activité. Mais qui peut bien vouloir racheter des crédits carbone ?

Et bien tout simplement les États et entreprises qui produisent justement beaucoup de CO2. En effet, en Europe, les pays doivent respecter un quota maximum d’émissions de CO2. Pour l’année 2020, il s’agissait de 450 millions de tonnes de CO2 pour la France. [4]  La France doit alors répartir ses quotas carbone entre ses entreprises. Si elle émet plus de CO2 que ce qu’il lui est autorisé, elle devra racheter des crédits auprès d’entreprises ou États qui détiendront des crédits carbone. 

In fine, l’idée est donc de chercher la neutralité carbone. Ainsi certaines entreprises ne pouvant actuellement pas produire moins de CO2 utilisent la possibilité d’acheter des crédits carbone, auprès d’entreprises qui séquestrent ou produisent moins de GES, pour compenser leurs activités.     

Alors est-ce que ça marche ?

À première vue, on observe des aspects très encourageants. Dans certains contextes, le fait de tarifer le carbone incite très fortement les entreprises et États à réduire leurs émissions de CO2. En effet, les coûts de réduction des émissions sont plus faibles que les prix du quota sur le marché, ce qui est censé encourager les entreprises à réduire leurs émissions pour revendre leurs crédits carbone et bénéficier de la différence.[5]

De plus, cette notion de crédit carbone pourrait jouer un rôle majeur dans le développement des pays émergents. Prenons l’Inde et ses 1,4 milliards d’habitants. Il est décisif d’orienter son développement vers la neutralité carbone dès maintenant pour ne pas voir ses émissions exploser avec sa démographie. Les crédits carbones peuvent être un moyen d’y parvenir. Les projets dit d’ “évitement” accordent des quotas aux entreprises qui investissent dans les énergies renouvelables comme le projet éolien Gandhi [6] pour réduire la dépendance de l’Inde au charbon et amorcer la transition.

De même, si le prix du carbone augmente, il devient plus intéressant financièrement de préserver les espaces séquestrant du carbone. Ceci induirait une réduction de la déforestation, qui entraînerait une meilleure captation du CO2 et aura donc à terme un effet positif sur la régulation de l’impact de nos activités sur le climat.

Cependant les crédits carbone peuvent amener à des biais non désirés. Le GreenWashing en est un. Certaines entreprises excusent la pollution engendrée par leurs activités par leur compensation. Planter des arbres ne résout pourtant pas les problèmes dus aux émissions issues du trafic aérien par exemple. De plus, la comptabilisation des émissions ne se fait que dans le pays où son activité est établie. La délocalisation de ses sous-traitements industriels n’entre ainsi pas forcément dans les calculs pour les quotas et peut biaiser le système. Le succès environnemental à long terme de cette économie de marché développée autour du carbone dépendra ainsi surtout de l’engagement des entreprises et de leurs projets.

Conclusion

AgroParisTech Service Études surveille son empreinte carbone en calculant son impact. Nous avons des compétences pointues dans le développement de la RSE et les analyses de cycles de vie, et nous accompagnons ainsi de nombreuses entreprises, souhaitant s’engager environnementalement, dans le calcul de leur empreinte carbone. N’hésitez pas à contacter l’équipe d’ASE pour faire grandir vos projets!