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Perturbateurs endocriniens : effets sur la santé et conséquences sur l’environnement

  • Temps de lecture estimé : 5 minutes
  • Auteurs : Elisa Polegato & Eléa Fournier

                Présents dans notre environnement au travers d’un large panel de produits alimentaires, manufacturés, cosmétiques ou pharmaceutiques, les perturbateurs endocriniens constituent une large famille de composés. Ces composés interagissent avec notre système hormonal, perturbant ainsi le fonctionnement de notre organisme. [1] Leurs effets, et leurs mécanismes sont encore peu connus et la communauté scientifique alerte sur leur dangerosité. A l’heure actuelle, plus de 800 substances ayant des propriétés de perturbateurs endocriniens, avérées ou suspectées, ont été identifiées. On relève entre autres les micro-plastiques, et les nanoparticules.[2]

L’étude de ces composés reste un enjeu majeur pour les autorités sanitaires qui cherchent à protéger les populations et les industries agroalimentaires et cosmétiques. Ces secteurs doivent faire face à la méfiance croissante des consommateurs, et à de nouvelles exigences de transparence. Les décideurs publics sont également concernés, du fait du lien avec la gestion de l’environnement, des déchets et le traitement des eaux usées. 

Une distribution variée et conséquente des perturbateurs endocriniens 

               La première source de contact pour l’Homme avec les perturbateurs endocriniens est l’alimentation. En juillet 2018, l’ONG Générations futures a annoncé que 6 résidus de pesticides sur 10 étaient constitués, en partie ou en totalité, de perturbateurs endocriniens. [3] L’agriculture intensive et l’utilisation d’intrants chimiques sont de plus en plus mis en cause, menaçant la santé des producteurs comme des consommateurs. 

La réglementation et les politiques publiques telles que la directive cadre sur l’eau (cadre réglementaire communautaire européen) et les plans ecophyto I et II en France, tendent à réduire l’utilisation de ces molécules. Cependant, celles-ci font l’objet d’un réexamen à l’échelle de l’Union Européenne, tous les 10 ans. Les alternatives aux pesticides sont peu nombreuses, difficilement applicables et moins efficaces. [13] De plus, on peut retrouver certaines substances néfastes dans des produits venant de l’étranger, tels que le thé. En effet, la réglementation étant différente selon les pays, l’exposition à certaines substances peut être plus importante.

               De plus, de nombreux objets de notre quotidien fabriqués en plastique contiennent des perturbateurs endocriniens. Notamment le  Bisphénol A, composé bien connu pour avoir des effets néfastes avérés sur la reproduction, le développement fœtal ou encore les pathologies cardiovasculaires. On retrouve entre autres ce composé dans les boîtes de conserve, l’aluminium, ou encore sur le revêtement de certaines casseroles. Ce perturbateur endocrinien est capable de se lier aux récepteurs α et β des œstrogènes, par œstrogèno-mimétisme. L’exposition est d’autant plus importante que la température est élevée. Le Bisphénol A a en effet la capacité de s’extraire des plastiques, pour entrer en contact direct avec l’aliment. Il est par conséquent interdit en France dans les contenants alimentaires. [4] 

               Enfin, la dernière source de perturbateurs endocriniens que nous allons décrire ici concerne les produits cosmétiques. [5] En effet, en 2013, une étude publiée par la Commission européenne a démontré qu’environ 40 % des produits de beauté et d’hygiène contenaient au moins un perturbateur endocrinien. Cette exposition est très importante. Il est donc primordial de connaître les effets et conséquences des composés contenus dans nos produits. [3] À titre informatif, les vernis à ongles sont les produits contenant le plus de perturbateurs endocriniens. Les fonds de teint et rouges à lèvres arrivent à la suite du classement. Suite à ces études, l’Union Européenne a interdit l’utilisation de nombreux phtalates dans les cosmétiques. Ces perturbateurs endocriniens ont des effets cancérigènes ou mutagènes sur l’Homme. 

Caractérisation des effets de ces perturbateurs endocriniens sur la santé

Comme nous l’avons vu précédemment, l’Homme est en contact avec de nombreux perturbateurs endocriniens, présents dans tout son environnement. De par la dangerosité de ces composés, il est essentiel de connaître au mieux les effets que ceux-ci peuvent avoir sur notre organisme. Bien que les effets de certaines substances soient établis à forte dose d’exposition, il est également nécessaire de cerner les effets à faible dose. 

En effet, pour certaines molécules toxiques, on considère qu’en-dessous d’une certaine dose, le système de défense de l’organisme est capable de lutter contre les agents extérieurs. On parle alors d’effet de seuil. Cependant, pour d’autres composés, le moindre contact présente des effets néfastes sur notre système : c’est le cas des molécules cancérigènes. On considère que les perturbateurs endocriniens fonctionnent de la sorte, c’est pourquoi il est important de les identifier. De plus, la sensibilité aux perturbateurs endocriniens varie selon les périodes de la vie. La période du développement fœtal et embryonnaire et l’enfance constituent des moments de vie où la sensibilité est accrue. [6]

Plus spécifiquement, les perturbateurs endocriniens altèrent le fonctionnement du système endocrinien (regroupant les organes sécrétant les hormones), en agissant sur la synthèse, la dégradation, le transport ou le mode d’action de ces hormones. L’effet toxique n’est donc pas direct, mais se caractérise par les conséquences liées aux modifications engendrées. À long terme, ces perturbations endocriniennes peuvent engendrer une altération des fonctions de reproduction, des malformations fœtales, l’apparition de tumeurs au niveau des tissus producteurs d’hormones ou encore une modification du sex-ratio. [1]

Les conséquences à plus long terme sur l’environnement

À plus grande échelle, ces molécules ont également un rôle néfaste. En effet, la plupart des perturbateurs endocriniens persistent dans l’environnement sous formes de traces, durant des années. Ils acquièrent également la capacité d’être transférés d’un compartiment à un autre, ce qui augmente encore leur concentration dans l’environnement.

Une étude publiée en avril dernier dans le Marine Pollution Bulletin, affirme que les micro-plastiques ont aussi bien des effets sur les poissons directement liés à l’ingestion, que des effets sur l’éclosion des larves ou sur leur comportement. [7] Par exemple, l’acide perfluorooctanesulfonique (PFOS), utilisé comme imperméabilisant, a tendance à réduire le nombre de larves produites par les poissons. Ces molécules ont donc des effets sur la population au sein d’un environnement donné. De plus, le ruissellement et l’infiltration dans le sol de ces produits, dus aux pratiques agricoles, contamine les cours d’eau et les nappes phréatiques, en ayant un impact environnemental important (diminution de la fertilité des amphibiens sous l’effet de l’atrazine, interdit en 2005 pour le désherbage du maïs en France par exemple).

Ces perturbateurs endocriniens constituent ici aussi une surveillance accrue. De par les stations d’épurations, les déchets des produits cosmétiques se retrouvent en grande partie dans le milieu halieutique. Certains de ces composés ont ainsi un effet sur le sex-ratio, et une réelle féminisation des poissons a été observée. [8] Les hormones issues notamment de la pilule contraceptive utilisée à grande échelle par les femmes se retrouvent dans les eaux usées. L’incapacité des stations d’épurations à éliminer les résidus d’éthinyl-œstradiol, œstrogène synthétique le plus utilisé, a pour conséquence la féminisation de poissons, et une modification du sex-ratio. À l’échelle humaine, le cercle peut être infini. En effet, ces composés se retrouvent par la suite dans l’eau courante, et reviennent ainsi à l’Homme.

Les tentatives d’alternatives et recherches en cours

La recherche est donc essentielle pour la santé mais aussi pour l’environnement. Il est nécessaire d’identifier les molécules catégorisées comme perturbateurs endocriniens, mais également de déterminer leurs effets et la dose d’exposition maximale tolérée de manière précise. 

Pour cela, différents types d’études peuvent être réalisées. Des études toxicologiques, aux études in vivo, en passant par les études bibliographiques, les recherches amènent de plus en plus à catégoriser ces perturbateurs endocriniens. Récemment, l’Union Européenne a financé le programme OBERON. Ce programme a pour objectif de mettre en place toute une batterie de tests. Cela permet alors d’étudier les effets de certaines substances sur notre système métabolique, et ainsi engendrer la création de nouveaux tests. [9] Ce type d’avancée permettrait alors une meilleure identification des perturbateurs endocriniens.

De nombreux programmes de recherches sont également en cours. Par exemple, l’Anses pilote le Programme National de Recherche Environnement-Santé-Travail (PNR EST). L’objectif de ce programme étant de renforcer les connaissances au sujet de ces molécules. Ce sont chaque année 2 millions d’euros supplémentaires qui sont alloués à ce projet prometteur. [6]

Actuellement, des recherches sont également effectuées afin de trouver des molécules de substitutions, pour limiter les effets néfastes. C’est notamment le cas des Bisphénol F et Bisphénol S. En effet, dans certaines applications, ils sont utilisés comme substituts du Bisphénol A. Cependant, il a récemment été montré que ces composés ont le même effet négatif sur le testicule fœtal humain que le Bisphénol A. [10] Les recherches à ce stade sont donc en constante évolution, et trop peu satisfaisantes pour le moment. 

Pour conclure, les perturbateurs endocriniens, molécules ubiquitaires faisant partie intégrante de notre environnement, sont extrêmement dangereux pour notre santé. Ils présentent en effet de nombreux effets néfastes, à différentes échelles. Les recherches à ce propos sont donc essentielles. Elles deviennent alors un enjeu primordial des systèmes de santé, et acteurs des sciences du vivant.

Chez AgroParisTech Service Études, nous pouvons vous aider à réaliser un premier pas dans cette recherche. Nous pouvons notamment vous aider à réaliser des études bibliographiques. Un grand groupe produisant des cosmétiques a récemment fait appel à nos services. L’objectif était d’analyser un ensemble de publications collectées afin de produire un rapport. Ce rapport recense le caractère éco-toxicologique de différents micro-plastiques. Cette étude a pour objectif d’utiliser des substituts plus respectueux de l’environnement, et moins nocifs.

Nous sommes à votre disposition pour tout échange, et toute notre équipe est en mesure de vous aider à faire grandir vos projets ! N’hésitez-pas à nous contacter, nous serons ravis de discuter avec vous !

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